Beachcomber Magazine 02

L’île a connu des émeutes en février 1999 à la suite du décès du chanteur créole Kaya. en réalité, ces événements étaient une révolte des plus démunis. À partir de ce constat, le groupe Beachcomber a créé la fondation espoir développe- ment pour renforcer sa responsabilité citoyenne et apporter une aide concrète aux plus démunis », explique Malenn oodiah, sociologue, président bénévole de la FED et directeur de la communi- cation du groupe. Ainsi est né le Projet Employabilité Jeunes lancé en 2001, qui a permis à ce jour la réinsertion professionnelle de plus de 1 200 jeunes marginalisés. Ainsi, l’association LocalHands, créée en 2006, qui a permis de rompre l’isolement et la précarité d’une soixantaine d’artisans et de leurs fa- milles. Certains travaillent chez eux, tous les autres – des femmes, pour la plupart – ont investi les quatre ateliers mis à leur disposition : couture, poterie, bois, recyclage. UN COMBAT QUOTIDIEN « C’est mon fils qui a entendu parler de Localhands. À sa demande, un respon- sable est venu me rencontrer. depuis j’ai des commandes régulièresdeshôtels : corbeilles, paniers de piscine, fauteuil ennidd’abeille », dit SanjayBrambodary, 51 ans. Aveugle depuis l’âge de 7 ans, il a appris à travailler le rotindès l’adoles- cence.quandsonétabli s’est envoléavec un cyclone, il s’est installé sous l’arbrequi fait face à sa maison, avant de pouvoir construire un hangar en dur. Anju a débarqué sans trop de compé- tences à l’atelier tissu de Phœnix. Pendant une année, elle a suivi un stage de couture financé par la FED. Son assiduité a fait le reste. « Mon fils est étudiant en archéologie à l’univer- sité de Madras en Inde. Je travaille pour lui envoyer un peu d’argent, mais c’est un combat tous les jours. » À Bambous, Lisette, Liseby, Georgette, Esther… façonnent de petits objets (porte-clés, boucles de paréo) dans la paille de coco, le bois de cerf ou le goyavier de Chine. Pop, lui, a l’intention de se mettre à son compte. « On l’aide à chercher un local et on s’assure de sa capacité de remboursement. Notre objectif est que chacun puisse accéder à une forme d’autonomie », explique viren vythelingum, responsable de LocalHands. viren, 39 ans, les connaît bien pour les « accompagnerauquotidien.« Nousdémar- chons pour trouver des commanditaires réguliers et renforcer notre réseau de distribution dans les boutiques des hôtels, les foires, lesmarchés. Les artisans fixent les prix, les revenus générés leur sont entièrement reversés. Mais il reste beaucoup à faire. Outre l’organisation, c’est tout un état d’esprit à développer. Ne serait-ce que pour responsabiliser chacun, les inviter à respecter les normes de sécurité, comme leport d’unmasque, ou les délais de livraison. C’est demander beaucoup à des personnes qui parfois n’ont pas même de quoi manger. Il faut du temps. Nous sommes sur la bonne voie. L’enthousiasmeestlà,indiscutablement. » RECOUVRER SA DIGNITÉ « Quand j’arrive ici, je mets mes mains dans la terre et j’oublie tous les tracas », dit Cathy. Elles sont cinq fidèles, unies comme les doigts de la main. « si on n’a pas d’amour, on ne peut pas faire de la poterie. C’est un métier difficile. On est sales. Il y a du stress. Mais moi je viens à l’atelier, même le jour de mon anni- versaire. » À quelques pas de là, l’atelier couture, dirigéparNicole.Elleétaitmachinistedans uneusinedebroderie. Sonamievaniday travaillaitaussicommecomptable.quand l’usine a fermé, elles ont rejoint l’atelier. « On travaille autant, si ce n’est plus, mais onen retireplus de satisfaction. Onparle beaucoupentre nous, on rit aussi. Ça fait du bien. Quand on n’a pas fini les com- mandes, on travaille à la maison, en famille. C’est un vrai métier. » « Ce ne sont pas seulement des savoir- faire mais des vies entières qui sont valorisées. Il y a l’argent qu’elles peuvent gagner grâce à leur activité. Il y a aussi d’autres valeurs qui opèrent : la confi- ance en soi, la fierté, la courtoisie, le respect des autres et, donc, de soi- même », dit viren.  CR AFTSMANSHIP THE ART OF SOLIDARITY 64

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