Beachcomber Magazine 02

L oin des palmiers et des plages, quatre Bornes plante ses immeu- blesmodernes et son centre com- mercial sur les Hautes PlainesWilhems au milieu de l’île. une vraie ville moder- ne apoussé là, autour d’unvieuxmarché de textiles. L’avenue Pasteur, voisine, est bordée de petites maisons proprettes aux allures de banlieue tropicale. Sur l’une d’elles, une inscription, « Bactory » : « Quand j’ai trouvé le lieu il y a deux ans, expliqueGaël, ona cherchéunnomavec mes copains. Ça devait être autant un rendez-vous de potes que mon atelier. une sorte de club sous influence pop et on a bien sûr pensé à la factory d’Andy warhol. Puis comme on était avenue Pasteur on a pensé aux bactéries du savant qui sont partout… comme moi sur les réseaux sociaux, ont ricané les copains. donc sans se prendre trop au sérieux c’est devenu la Bactory où, avec mes amis,musiciens écrivains ouartistes, on se pose, palabre et refait lemonde ! » En short et en tee-shirt, Gaël nous entraî- ne dans un atelier kaléidoscopique où les graffitis sur les murs se mêlent aux œuvres qui s’y entassent. : « J e peux travailler sur vingt tableaux à la fois, tant les images se bousculent dans ma tête, trop impatientes de sortir pour attendre que ça sèche. » Entre danse et action painting il virevolte des uns aux autres, jonglant avec les bombes acry- liques, les pinceaux, les feutres et les fusains. tout ici dégouline de couleurs flashy, apparemment joyeuses, mais qui, pour Gaël, sont aussi celles de l’émotion et des tragédies contemporaines. DE LA MODE AU VANDALISME tout a commencé pour cet artiste auto- didacte, juste trentenaire, dans les salles d’attente des docteurs où, ado déjà vandale, il barbouillait les photos des magazines de traînées de feutres noires ou colorées. Après des études supé- rieures, il se cherche… et se retrouve « seul dansma chambre d’étudiant, pas de papier, pas de matériel, pas de sou, à gribouiller sur le seul médiumque j’avais sous la main, les pages des revues. » Il commence alors méthodiquement à « vandaliser » d’unœil rebelle et sarcas- tique, les visages trouvés dans les revues haut de gamme, déversant sur eux une peinture enragée comme des coups depoing. une sortede street art àusage intime. Sur les pubs, qui n’échappent pas à ses attaques, il remplace les marques par son nom, poste le tout sur Face- book et une foule de nouveaux amis trouvent ça génial. Àvingt et un anGaël se prend au jeu : « Ça pourrait devenir mon métier… » voulant tester une vocation un peu tiède pour la mode, il part en Malaisie suivre des cours de « Fashion andRetail Design ». L’université lui propose des petits jobs dont celui d’assistant de la dynamique directrice de la « Malaysian International Fashion Alliance » qui l’encourage à participer à une expo à Kuala Lumpur au titre sur mesure : « Artificial Beauty ». Gaël échange alors ses ciseaux pour des pinceaux. Le monde de l’art lui reste pourtant totalement étranger jusqu’à son retour à Maurice : « La première vraie expo à laquelle j’ai assisté, c’était la mienne. » C’est en 2013, à la IMAAyA Gallery où PAINTING THE ART OF ART 84

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