Beachcomber Magazine 03

E lle marche le long de la plage, à la lisière de l’écume des vagues. Sa silhouette est gracile, son pas précautionneux. L’équilibre est fragile. Mais rien n’entrave son large sourire quand la vague attendue – mais toujours surprenante – vient lui lécher les mollets. Elle s’agenouille parfois pour caresser la peau de l’eau. AU GRAND JOUR Jane est l’unique enfant de Françoise et Tony. Elle est née le 16 septembre 2000. Sa mère est institutrice. Son père a créé une fabrique de ma- quettes de bateaux et joue du piano. « Quand mes parents ont appris que j’étais aveugle à ma naissance, ils ont voulu voir en moi ma capacité à faire des choses au lieu de s’attarder sur mon handicap. J’ai commencé à chanter à l’âge de 5 ans, à étudier le piano à 7 ans... Même si j’ai vite compris que j’étais différente, même si je sentais la gêne et l’inquiétude parfois des gens “normaux”, je n’ai pas voulu vivre cachée, cloîtrée. Au lieu de me dire “Pourquoi moi ?”, je me suis dit “Pourquoi pas ?” », dit Jane d’une voix haute et claire. Après ses années de primaire dans un établissement spécialisé, Jane entre au collège, où elle passe le baccalauréat cette année. « C’est important pour moi de ne pas me sentir exclue et de communiquer avec les autres. Je vais volontiers vers eux, j’aime les écouter, je suis quelqu’un de très ouvert. Les gens ont souvent peur de la différence et c’est à moi de les rassurer. M’accepter, c’est aussi permettre aux autres de m’approcher », sourit la jeune fille. UN RÊVE TANGIBLE Sa voix l’a portée sur le devant de la scène. « À huit ans, j’ai commencé à faire des petites salles à Maurice. J’adorais ça ! Ça me faisait du bien d’être félicitée. Bien sûr, je ne pouvais pas voir le public mais j’entendais les applaudissements, je ressentais l’énergie. » La consécration survient en 2015 quand Jane remporte à 15 ans la finale de l’émission The Voice Kids en France. « Alors j’ai su que j’étais à ma place. J’ai senti que grâce à ma voix je pouvais briser les barrières et provoquer des émotions. Grâce à la musique, mon handicap ne serait plus un obstacle. Bien au contraire. J’ai travaillé dur pour réaliser mon rêve. Aujourd’hui je pense que c’est peut-être parce que je suis aveugle que je suis allée plus loin et que j’éprouve la nécessité ARTIST FOR PEACE THE ART OF ENCOUNTER 34

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