Beachcomber Magazine 03
ou encore le curcuma, véritable soleil insolent des sauces, épice aux multiples bienfaits pour la santé. C’est lui précisément qui donne à ce plat sa saveur mauricienne. C’est- à-dire, solaire, accueillante et métissée. La grande force de l’île ne réside-t-elle pas dans sa capacité à puiser un peu partout dans le monde ce qui convient le mieux à sa félicité ? D’où ce curcuma, joyau originaire d’Inde et de Malaisie. Il sort de son terroir, s’ouvre au monde entier, et donne à l’assiette son amplitude. C’est le propre d’une grande recette que d’assembler pour élargir et non réduire l’horizon. LA NOBLESSE D’UNE ASSIETTE Lorsqu’il travaille un poisson, le chef Puresh n’est pas du genre à trop le brusquer. Regardez-le ! Il trône au centre de l’assiette, accepte quelques décorations estompées – pétales de pensée, semis d’épices, un peu de thym... La vieille n’est pas du genre bégueule et accepte volontiers la compagnie. Ceci dit, point trop n’en faut. Voilà pourquoi affleurent sans parasiter des brèdes chouchou – des légumes feuilles –, nos crevettes au cumin aux antennes dressées, et, histoire d’apporter un peu de croquant, la dimension musicale du plat, une tuile à pain revenue au beurre fondu. Logiquement, lorsque cette dernière est alanguie sur le tribord de l’assiette, les doigts ne peuvent s’empêcher de l’approcher. Et de la saisir : c’est la dimension tactile du plat. L’HOMME ET LA MER Le chef Puresh choisit ses vieilles lorsque les fournisseurs viennent le matin présenter leurs arguments. Les variétés fluctuent en fonction des saisons, ainsi la vieille rouge excelle d’octobre à janvier. Pourtant, quelle que soit la saison, Nived Puresh aime se promener sur la plage (nous y revoilà !), interroger les pêcheurs. Si le poisson lui plaît – trapu, vivace, rouge orangé...–, on fait affaire, et le soir même, la pêche joue de la nacre dans les assiettes. Le chef du Victoria est un peu comme les grands écrivains. Il n’est pas là pour s’imposer. Mais pour s’effacer lorsqu’il le faut. Si des enfants veulent un poisson plus élémentaire, il sera capable de préparer des pâtes tout en gardant la dimension iodée du plat. Pour tous les autres, la vieille poêlée se déguste à toute heure, c’est dire sa bonne humeur. Et si vous désirez choisir l’accompagnement d’un vin, le conseil du chef sera clair : blanc fruité. Un plat prend également toute sa dimension lorsqu’il s’inscrit dans un cadre. Et quel décor ici ! Au restaurant L’Horizon, la recom- mandation de notre chef hospitalier pour mieux goûter sa vieille, serait de décrocher auprès du maître d’hôtel l’une des tables dressées sur la plage, avec, pour unique voisin, le lagon sans fin. © Photograph BEYOND Photogrpahy ltd
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