Beachcomber Magazine 09

VISUAL ARTIST THE ART OF ENCOUNTER 50 Un peu perçu comme un OVNI », David Constantin est adolescent quand il monte, au collège, un ciné-club « pour regarder des films à la récré ». Avec Kenneth Noyau, qui devient pour lui une sorte de mentor, il se met par la suite à faire des photos pour des magazines d’entreprises. Un déclencheur fort, qui lui permet d’entrer dans le monde ouvrier, les usines, la poussière, le bruit, les visages qui disent des vies souvent minorées. En 1997, David a 23 ans quand il part faire des études de cinéma à l’ENSAV de Toulouse (École Nationale Supérieure d’Audiovisuel). Une « bouffée d’air », se souvient-il. Rentré à Maurice à reculons en 2002, il s’engage dans une pratique parallèle au cinéma : la peinture. Cette rencontre, il la doit très tôt à son père Serge, peintre renommé. Enfant, il le suit avec le petit groupe d’élèves et d’amis qui, chaque samedi, se retrouve pour peindre dans les rues de Port-Louis, la capitale. Si peinture et cinéma ont d’abord été très séparés, David Constantin avoue aujourd’hui, à bientôt 50 ans, qu’il aimerait joindre les deux. « J’aimerais faire une expo qui se vivrait comme un film », dit-il, avec une continuité qui prendrait comme point de départ le lieu où il vit : Belle Étoile. « On était à la campagne, aujourd’hui on est en ville. » LA PART D’HUMANITÉ La création de David Constantin creuse à l’évidence un sillon : celui d’une île qui change à vue d’œil, dans un mouvement dont la rapidité et la « surdité » souligne l’impuissance des individus face au rouleau compresseur du « développement ». Se défendant d’être dans la nostalgie, il est à la recherche de l’humain dans une île-laboratoire. Ce qui l’intéresse, c’est comment l’individu se débat, se débrouille, pour vivre au cœur de la violence latente du contexte local et général. Avec Lonbraz Kann, son premier long métrage en 2014, il met en scène le bouleversement des personnages ancrés dans une terre à sucre qui leur est enlevée, dans le cadre d’un aménagement foncier au profit de riches expatriés. Dans Simin Zetwal, (Regarde les étoiles) en 2022, il livre un périple à la fois réaliste et onirique dans la foulée de la génération suivante, avec des jeunes pris dans la nécessité et le désir de quitter une terre qui a cessé de nourrir leurs parents. Ses documentaires, Diego l’interdite (2002), Grat lamer pintir lesiel (2021) et Sorry for the Inconvenience (2023) racontent aussi des histoires d’attachement et d’exploitation. Mis bout à bout, tout cela donne une passionnante photographie contemporaine, non d’un pays en soi, mais des individus qui en constituent l’ancrage et la sève. Une authenticité et une universalité qui lui valent une reconnaissance internationale, audelà d’un pays qui cherche encore à apprivoiser son rapport à sa propre image.  « LA CRÉATION DE DAVID CONSTANTIN CREUSE À L’ÉVIDENCE UN SILLON : CELUI D’UNE ÎLE QUI CHANGE À VUE D’ŒIL.

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