Beachcomber Magazine 08

Lorsque l’on découvre pour la première fois un tamarin, on a du mal à deviner son cheminement. C’est une gousse couleur marron d’une rare banalité. Elle évoque vaguement une cacahuète. Légèrement incurvée et duveteuse, elle semble même disgracieuse, sans grand intérêt. Mais lorsque l’on aperçoit sur sa cheminée la photo de ses parents, on se frappe le front de la paume. Le tamarinier est magnifique. Il est majestueux, procure une ombre délicieuse et la floraison venue délivre de jolies fleurs jaunes veinées de rouges. Encore un des mystères de la nature où l’apparente disgrâce augure des bienfaits insoupçonnés. Le fruit du tamarinier aurait pu se la couler douce, faire le fils à papa, profiter des murmures louangeurs destinés à cet arbre magnifique, rêvasser derrière ses lunettes de soleil. Or le tamarin appartient à ces fruits frondeurs, travailleurs, capables de mille prodiges. Il bosse, quoi. Il essaie de prouver qu’il n’est pas un bon à rien ; il effacerait presque la renommée de ses géniteurs. UN MIRACLE DE SAVEURS Lorsqu’on ouvre sa tendre carapace de 10 à 15 cm de longueur, apparaît une pulpe brun-rouge à la consistance de datte. S’y logent des graines robustes, presque rectangulaires. Pour le moment, rien de notoire, si ce n’est le spectacle intriguant d’un fruit muet. C’est en bouche que le tamarin prend tout son sens. Surprise : il explose de saveurs. Suivez bien son chemin. Il part dans deux directions : le sucré et l’acidulé. Parfaite ampleur pour inciser et balancer une douche de bienfaits. Cette pulpe est, apprend-on, surtout riche en pectine et en acides organiques, notamment citrique et tartrique, d’où sa teneur importante en vitamine C, mais aussi B1, B2, B3, B11. Sans oublier une douche de minéraux : calcium, phosphore, fer, sodium et potassium. Voilà pour le récital. La force du tamarin, c’est son amplitude ramassée. C’est pourquoi sur l’île Maurice, il se voit dédier non seulement un village et une baie réputée sur la côte ouest, mais aussi il fait les affaires des cuisiniers. Ces derniers, selon leurs recettes, peuvent le faire jouer comme un acteur polyvalent. Si l’on souhaite le faire intervenir dans sa dimension acidulée façon agrume, il est parfait pour réveiller un plat paisible, surligner ses goûts, à condition de le doser subtilement. Le tamarin peut entrer dans la danse des desserts lorsqu’on le laisse mûrir suffisamment. L’INCONTOURNABLE Si au Brésil, le tamarin est souvent consommé nature, comme une cacahuète, en évitant les gros pépins, en Égypte, la pulpe est roulée et séchée pour rejoindre des infusions froides à base d’hibiscus. En Inde, il donne du corps aux massalas ; en Turquie, il s’adonne aux sorbets. Sur l’île Maurice, on a surtout pensé à le faire fonctionner sur les deux versants. Il rejoint ainsi naturellement la confection des chutneys, histoire d’aller chahuter avec la mangue verte, la coriandre, la menthe… C’est le début alors d’une conversation soutenue avec une infinité de plats. Le tamarin est une sorte de personnage bilingue (l’aigredoux). Il fait la joie, l’entrain des plats. Il colorie les recettes, leur apporte tonus, bonne humeur, cet « allant » indispensable à la réussite d’un plat ; l’une de ses FINE CUISINE THE ART OF TASTE 84 © Envato Elements a dish successful; it is glorious when cast in the ingredient list for Worcestershire sauce, the famous English condiment. In summertime, the tamarind is used as an ingredient in juices with light or dark cane sugar added. And as if it were determined to prove just how useful it is, it has an additional use in the kitchen: its pulp is a miracle product used to polish copper utensils. The tamarind has that ingenious power of all strange fruits to over-compensate for its inferiority complex. We didn’t think it counted, so it set out to surprise us and prove us wrong.  

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